Monday, April 20, 2009

To begin with


Je reste interdit quand je vois le peu de considération dont jouit l'oeuvre de Frank Sinatra en France. Une oeuvre qui court sur plus de 50 ans qui compte plus de chefs d'oeuvre que peuvent en contenir les carrières de Bowie, Dylan et Springsteen réunies (trois admirateurs avoués) et qui souvent se résume à trois misérables titres : Strangers in the night, My way et New York New York.
Le plus grand chanteur américain du vingtième siècle (du moins à mon goût) n' apparaît ni dans les playlists jazz (pas assez puriste), ni dans le Rock'n'Roll Hall of fame (ce qu'il n'aurait d'ailleurs guère goûté) et malheureusement ni non plus dans l'excellent Playlist pop-rock d'El Mariako. Avec Marvin Gaye (présent ici), c'est sans doute l'absence la plus douloureuse mais on flirtait là dangereusement avec le hors-sujet (et puis, admettons-le, ses titres cross-over sont ce qu'il y a de plus dispensable dans son immense catalogue). Alors, plutôt que d'attendre une version extended de Playlist, je me permets d'aller piocher 10 trésors dans une oeuvre (on est bien d'accord) qui en compte des centaines et des centaines et de vous les proposer à l'écoute en 2 fois 5 titres.
Je vous propose une sélection en accord avec la chronologie car la voix du Chairman n'a cessé d'évoluer des premiers rouleaux enregistrés avec le Big Band d'Harry James (1939) aux duos pathétiques gravés au crépuscule de sa vie (1993).
1. I'll be seeing you (1941 ou 1942 ?)
Francis Albert fait ses crocs sur les orchestrations de Tommy Dorsey. L'ombre tutélaire de Bing Crosby n'est pas encore effacée mais le charme est déjà là et les Bobbysoxers se pâment.
2. I concentrate on you (1944)
Swoonatra au faîte de sa période Columbia : splendeur du timbre, rigueur de la diction, passage de rêve. Les G.I's écument de jalousie.
3. I'm a fool to want you (1951)
Ava fait de Frank sa créature et The Voice devient en moins d'une année un has been à l'agonie. Columbia lui fait enregistrer des horreurs (Mama will bark) mais aussi son premier absolu chef d'oeuvre. Alors, après, version Stordahl (ici) ou Jenkins? Les fans continuent de s' entredéchirer.
4. Laura (1957)
Frank transfigure le thème du film de Preminger (songeait-il dans le studio à Gene Tierney?) en prodiguant une leçon de chant à écouter à genoux. Et Jenkins signe un arrangement superlatif (les premières mesures sont à tomber)
5. Around the world (1957)
Billy May se hisse à la hauteur de Nelson Riddle et de Gordon Jenkins sur ce petit bijou signé Adamson/Young. Frank laisse la concurrence (Tormé, Hartman, Haymes) loin derrière.

3 comments:

daniel said...

Au rang des artistes dont on a oublié qu'ils étaient avant tout une voix tu as celui-ci aussi :
http://next.musicblog.fr/460414/J-avoue-j-ai-bave/

Christophe said...

ça fait plaisir un éloge aussi franc de Sinatra. Je partage votre consternation quant à l'indifférence dont il est l'objet dans les milieux soi-disant cultivés, parisiens notamment. Des gens urbains et spirituels qui connaissent tous les folkeux indépendants mais qui avouent presque fièrement ne rien connaître de Frank Sinatra, pas même une compile.

je suis loin d'avoir votre qualité d'appréciation du chant mais je me permets d'y aller moi aussi de ma petite sélection. Plus pour les chansons en elle-même que pour les interprétations donc.

This was my love - 1959
http://www.youtube.com/watch?v=h63R7aaQy9g
présente en bonus sur No one cares, j'avoue qu'elle m'émeut plus que l'ensemble des chansons officielles de l'album, pourtant un chef d'oeuvre absolu.

September of my years - 1965
http://www.musicme.com/Frank-Sinatra/albums/September-Of-My-Years-0603497977314.html#
Mon Frankie préféré, c'est lui, le quinqua nostalgique et élégant.

The train - 1970
http://www.musicme.com/Frank-Sinatra/albums/Watertown-0093624568926.html#
Extrait du concept-album Watertown écrit par les compositeurs de Franki Valli pour relancer le vieux. D'aucuns disant qu'il s'agit de son dernier chef d'oeuvre. Cette chanson est déchirante je trouve.

Send in the clowns - 1976
http://www.youtube.com/watch?v=-7ieMpLL2VM
un chef d'oeuvre de Stephen Sondheim interprété par Frankie tout seul avec un piano. c'est simple, c'est sublime. les anecdotes au début de l'enregistrement sont je crois typiques de Sinatra en concert qui plaisantait pas mal avec le public si j'en crois son live at the Sands.

My way - 1974
http://www.youtube.com/watch?v=-9oZgf31uhg&feature=related
le loukoum je sais, c'est bientôt nostalgie, moumoute et Reagan, mais Sinatra c'est AUSSI de la belle variété comme on ne devrait pas avoir honte de s'y abandonner, c'est la première chanson chantée par lui que j'ai aimée et elle m'émeut toujours énormément et contrairement à cette de Française Hardy, je crois que c'est une bonne chanson.

Eric Aussudre said...

Ah, Christophe, décidément, que de points communs! Watertown sera bientôt à l'affiche d'Unknown Pleasures et The September of my years est aussi mon Frankie Préféré (j'y reviens!)