Sunday, January 19, 2014

Diamonds And Rust


Je pensais le cas Joan Baez une affaire classée. Je croyais ne plus jamais écouter ses disques. La faute à une musicassette offerte par des amis de mes parents lors du jour de l'an 1984. Le Live in Europe 1983, un infâme brouet recyclant mal les succès datant de son idylle avec Dylan et tentant maladroitement de renouer avec la génération qui était la mienne alors (Children of the eighties, Lady Di and I) . Toutes ces reprises me semblaient sonner pareil, Duteil comme Dylan, Lennon comme Marley. Les mêmes ponts aux ânes de l'humanitarisme dévoyé. Beaucoup de bons sentiments et si peu de musique. Bref, je rangeais la cassette avant de la donner à une amie de passage. Pour ne plus y penser. Joan Baez était devenue dans  mon imagination une dame patronnesse aux airs de jolie Madone s'étant servi du Zim pour asseoir sa carrière et gérant habilement les dividendes d'une popularité usurpée. Ce qui était, bien sûr, une pénible contre-vérité, Dylan reconnaissant honnêtement dans Chronicles que Joan Baez, célèbre avant lui, lui avait permis d'accéder à un plus large public. 
Il m'a fallu près de trente ans pour en finir avec cette image erronée. Une première réévaluation vint avec la lecture de Chronicles mais l'antidote absolu fut Diamonds And Rust, une chanson et des arrangements qui suffiraient à eux seuls à établir sa gloire pour l'éternité. Epaulée par des musiciens de session flirtant avec le jazz, elle assure elle-même l'incroyable partie de guitare inaugurale tout en imposant ce moog incroyable à 25 secondes semblant nimber le tout d'une lumière irréelle. La voix est belle, sans effets ou presque sinon ce vibrato unique qui faisait dire à Dylan qu'il "chassait les mauvais esprits". le texte, sans être à la hauteur de son élève devenu mentor (mais combien l'ont approché ?) redistribue joliment les cartes de ce qui fut leur relation, sans rien oublier ("my poetry was lousy you said") mais sans sentimentalité excessive ("Yes I loved you dearly And if you're offering me diamonds and rust I've already paid"). 
En 4"49', Joan Baez s'offre un classique aussi intemporel que celui délivré par le destinataire de cette merveille dix mois auparavant.

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