Sunday, August 06, 2006

Das letzte lied

O weiter, stiller Friede !
So tief im Abendrot.
Wie sind wir wandermüde-
Ist dies etwa der Tod ?

Eichendorff

Elizabeth Schwarzkopf

A 16 ans, je n’écoutai ni Joy Division, ni les Clash ni même les Cure. Non, à 16 ans, mon idole c’était Elizabeth Schwarzkopf. Je l’avais découverte un samedi matin en écoutant sur France-Musique la tribune des critiques de disques consacrée aux Quatre derniers lieder de Richard Strauss. Il y’avait d’autres chanteuses sur lesquelles se disputaient Armand Panigel et Jacques Bourgeois mais je n’avais retenu qu’elle et son « timbre de glacier » pour reprendre les mots d’Eric Dahan dans sa nécrologie parue hier dans Libération. Blonde et finement taillée, il était plus facile de la vénérer qu’au hasard Montserrat Caballé ou d’autres Castafiore. Autant dire pourtant qu’au lycée une telle dévotion n’était pas loin de signer mon arrêt de mort social. Ils étaient peu nombreux celles et ceux à qui je pouvais confier mon goût pour cette interprète d’élection de Mozart ou d’Hugo Wolf ( un compositeur que je n’aurai sans doute jamais découvert sans elle). Alors, seul ou à deux, nous nous délections de sa diction, de sa sophistication aussi et de cette affectation tant reprochée par d’autres et qui aujourd’hui se transforme en blason pour l’éternité. De décembre 1982 à juin 1984 , elle trôna avec Callas dans mon panthéon musical. Après bien sûr viendraient d’autres icônes et d’autres musiques.

13 comments:

Eric Aussudre said...

"Ô calme incommensurable du soir,
si profond dans le rouge du couchant !
Comme nous sommes las de marcher !
Serait-ce la mort ?"
Traduction approximative du dernier verset de ce poême d'Eichendorff, Im abendrot.

Anonymous said...

Hello Sonic !
C'est sur ce type de billet que l'absence de mp3 dans ton blog se fait le plus sentir!
On aimerait entendre cette voix de glace.

RYS

Eric Aussudre said...

Merci pour cette critique, l'ami Civil, car ellle m'oblige à me bouger pour tenter de justifier l'absence de Mp3s dans mon blog.
A cela, plusieurs raisons (plus ou moins bancales):
1. Une nullité crasse en informatique qui fait que l'existence même de ce blog tient déjà du miracle et du gros coup de pouce d'El Mariako. Alors, après, créér un lien vers une source sonore. Ouille, ouille, ouille!
2. Ma bécane est à bout de souffle et j'attends la prochaine pour tenter le coup sérieusement. Procrastination, quand tu nous tiens.
3. Je me connais. Si jamais je mets des Mp3s dans mes posts, je ne ferai plus aucun effort pour écrire un texte un tant soit peu développé ( j'entends des voix qui disent: tant mieux !).
Bon, je reconnais que la dernière raison est un peu oiseuse et que je suis bien content de profiter des mp3s aimablement mis à disposition par toi et d'autres. C'est vrai !
Cela dit, dans le cas précis d'Elizabeth Schwarzkopf, je n'ai pas trop de regrets car elle avait une sainte horreur du son numérique et n'avait pas de mots assez durs lorsqu'elle parlait du transfert en cd de ses disques. A 85 ans pasés, devenue aveugle, elle continuait à écouter ses disques en se critiquant sans cesse mais c'était uniquement des vinyles. Ce qui finalement la rapproche de pas mal d'indie bloggers.
Si tu veux vraiment l'entendre, ce n'est pas trop difficile car sa discographie officielle est considérable (son mari, Walter Legge, dirigeait le secteur classique chez Emi, ce qui n'était évidemment pas un obstacle).
Si je devais conseiller trois disques, ce serait :
- Quatre derniers Lieder de Richard Strauss avec George Szell comme chef ( seul disque classique que j'ai continué à écouter même quand je n'écoutais plus de classique).
- Le Chevalier à la rose dans la version Karajan. Si tu trouves que trois heures d'opéra, c'est un peu long, commence par le premier acte. Le livret d'Hoffmanstahl est un bijou (c'est souvent ce qui pêche dans le lyrique)
- Wolf : 22 lieder avec Fürtwaengler. Elle y fait un sort à chaque mot. Fascinant.

Anonymous said...

Merci de tout ces conseils. Je crois que je vais plutôt tentet les lieder (c'est vrai que l'opéra me fait un peu peur).

Te bile pas pour les mp3 : tu va progresser en informatique ; un mp3 deci delà ne gènera pas ton style ; et ta prochaine bécane is coming soon...

RYS

Anonymous said...

Si un producteur aventureux avait un jour décidé de financer un biopic sur la dame, le rôle aurait logiquement dû échoir à Kim Novak, non ?

Eric Aussudre said...

Hé, hé, pas mal comme idée Rorschach mais Kim donnait seulement l'illusion d'être froide (en fait, je crois surtout qu'elle manquait de confiance en elle) alors qu'Elizabeth pouvait vraiment être glaçante. Elle refusait notamment d'embrasser ou de dimplement serrer la main de ses fans par peur des bactéries !

Anonymous said...

Cadeau Sonic (si tu ne les a déjà vu)
Deux extrais du Chevalier à la Rose (si j'ai bien pigé You tube)
http://www.youtube.com/watch?v=_2V-IpiNC_0

http://www.youtube.com/watch?v=MqKJQEOaMyg

et là une leçon donnée à une élève
http://www.youtube.com/watch?v=5cI38t5yeYs

RYS

Eric Aussudre said...

Merci, Civil, t'es un chef ! Tes liens marchent bien mais il faut reconnaître que la précarité du son et de l'image chez You tube sont fatals au glamour de la dame. Mieux vaut tâcher de trouver ça :http://www.amazon.fr/gp/product/B000068RQ8/171-9442511-5090617?v=glance&n=405322 .

totagata said...

C'est vrai que sa version avec Karajan était de feu et de glace. Pour ceux qui cherchent plutôt la chaleur et la chair, essayez l'enregistrement des bachianas brasileiras par Victoria de los Ángeles. Mêmes années studio. Même éternité.

totagata said...

heu si ça interesse le maître des lieux, il y a une reportage sur arte ce soir consacré à la grande dame ; Samedi 22h30

Anonymous said...

Monsieur mon cher Eric,

Sans te connaître, ou alors de façon indirecte, je te lis depuis un certain temps et me décide enfin à t'écrire... pour t'amener plus loin, peut-être, là où tu serais plus authentiquement toi-même (mais ça, c'est difficile, surtout parce que tu te masques à toi-même en croyant l'être quand tu n'es pas tout à fait dans le politiquement absolument correct... sans voir que ce petit démarquage est indigne de toi). Ne crois pas que la lecture de Nabokov ait éveillée en moi quelques envies déplacées, le rugueux quotidien se contente déjà de m'informer de ce qui ne va pas quand on approche de trop près, non pas le soleil, mais la quarantaine... Laissons cet exorde un peu capiteuse et venons-en à Dame Schwarzkopf.
Quand tu dis, à la fin de ton billet, qu'après viendraient d'autres idoles, tu fais croire qu'Elizabeth Schwarzkopf (drôle de nom pour une blonde, encartée comme Karajan à la bonne époque- voilà le suffisamment politiquement incorrect qui doit te séduire aussi) était un amour juvénile, assez irréfléchi et socialement condamnable. On voit d'ailleurs que le virus t'était venu suite à une écoute radiophonique; tu livres sur toi-même une clef plus qu'importante : je crois que pour te plaire, il faut apprendre à plaire à d'autres auparavant(voilà une idée si je voulais te séduire...)Tu es sans doute de ceux à n'aimer qu'en second, sans véritable avis avant qu'on t'en reparle (et si je t'amenais une fois au cinéma, sans que tu aies lu Télérama ou les Inrockuptibles auparavant... serait-ce comme te jeter dans le vide et sans parachute ? allez, arrête de rêver et reviens à ce que j'ai à te dire).
Non seulement l'âge devrait t'amener à la réécouter loin des clichés que tu affectionnes, ce qui sera difficile("sa voix de glacier", pourquoi pas ses yeux de nuit, ses robes de printemps... les journalistes se croient des génies quand ils emploient une métaphore galvaudée, mais est-ce suffisant pour que tu t'agenouilles et recueilles précieusement cette fiente de l'esprit?) mais il devrait aussi te ramener vers cet essentiel qu'est le chant, ce noyau infracassable d'ombre sensible qui grandit en nous à mesure que nous nous dépouillons des clinquants adolescents. Je n'ai pas la moitié de ton âge, mais je suis souvent amusément consternée par cette adolescence que tu cultives fraîchement avec grand fracas. Est-ce cela après tout la peur de vieillir ? Je t'apprendrai à conduire de nuit, les yeux bandés avec ma main sur ton genou comme seule guide. Arrête encore de rêver... Il te manque une mèche rebelle et un peu de gel... mais pour cela le temps a fait son oeuvre et j'arrive incommensurablement en retard (je parle des deux décennies que j'abolis d'un coup en t'écrivant). Je comprends aussi que tu puisses fasciner de jeunes collégiennes ou encore quelques fraîches lycéennes. Ton romantisme est celui, un brin désuet, des Lagarde et Michard qu'affectionnent aujourd'hui les demies-mondaines qui ont la quarantaine bien tapées. Mais sont-ce celles-là qui te font rêver? Je te ferais peut-être goûter un rêve autrement plus savoureux, en écoutant Schwarzkopf (dis, tu as déjà fait tendrement l'amour en écoutant les quatre derniers lieder?) Reste tel qu'en toi-même, va, puisque c'est comme cela qu'on te lit, le sourire aux lèvres, et avec un peu de commisération. Je saurai bien te rendre un peu de légèreté, moi. Et de gravité aussi. Allez, sans rancune et à bientôt tout de même (et j'aime cette dernière syllabe).

Lolita

Anonymous said...

Waah !

Eric Aussudre said...

Difficile de ne pas opiner du chef en vous lisant, chère inconnue. Mes petites impostures semblent n'avoir aucun secret pour vous et j'ai du mal à croire que nous ne nous soyions jamais croisés (cela me perturbe énormément de ne pas connaître votre identité). Je plaide coupable pour le délit d'influence même si Télérama et les Inrocks ne comptent plus aujourd'hui beaucoup dans mes "pratiques culturelles". En revanche, il y'a dans ce que vous m'écrivez un petit malentendu qui me vexe. Je n'ai pas voulu dire en concluant mon billet que la diva berlinoise n'était qu'une passade juvénile. J'ai simplement voulu suggérer que pour pleinement l'apprécier, il me fallait au prélable connaître d'autres emballements.
Quant à devenir enfin moi-même, la tâche ne m'a jamais paru aussi ardue tiraillé que je suis entre des aspirations contradictoires. Je doute souvent d'être un jour à la hauteur des attentes ( si jamais ils en ont) des internautes qui par un heureux hasard (?) sont un jour venus sur ce blog. Quoiqu'il en soit, merci de me rester fidèle . Votre implacable lucidité fait mal mais j'avoue aussi ne pas être économe quand il s'agit de donner le bâton pour me faire battre.
Evidemment sans rancune.