A Bob Stanley,
Acheter un disque le jour de sa sortie, consulter compulsivement une notice biographique sur AMG, acheter le New Musical Express dès qu’on passe le channel, affronter des remarques désobligeantes pour un screensaver un peu hardi de Thora Birch, lire attentivement le livret des anthologies Where the girls are , racheter en vinyl les disques qu’on avait jusqu’alors uniquement en cd, télécharger toutes les reprises possibles et imaginables de When you walk in the room, frissonner d’aise lorsque que Boy George mentionne Maladjusted comme son favourite Sunday morning record.
Ce ne sont pas des gestes, des sentiments dont je puisse me dire à 38 ans : c’était hier et maintenant ce n’est plus rien pour moi.
Sur ce point ( l’un des seuls ), le temps n’a pas modifié la conception que j’avais de mes inclinaisons futures . A 19 ans résonnait sans cesse en moi les paroles du refrain de la chanson des Beach Boys : « When I grow up, will I dig the same things that turned me on as a kid ? » La réponse, je peux maintenant la formuler, elle est abrupte : non. Non, les puzzles, les parcs d’attraction , le ski, le générique de Zorro, les jeux vidéo, le retour du Jedi, l’odeur des vestiaires ( et pourtant ) ne me font plus l’effet qu’ils me faisaient auparavant. Ce n’est plus ça. Mais mon goût pour la musique, pour son imagerie, pour ses symboles, lui, m’est resté. Je ne l’ai pas troqué pour le golf ou pour les monospaces. Bien sûr, ce n’est pas tout à fait la même musique qu’autrefois. Je n’ai pas détaché mes posters d’Elvis du sous-sol familial pour les fixer au dessus de mon lit. Je passe moins de temps à contempler les photos d’ Elizabeth Schwarzkopf dans Der Rosenkavalier mais il m’arrive de caresser la pochette de Faith comme si c’était un talisman. Mes chanteuses préférées ( liste sur demande ), je pourrai très bien avoir leur minois dans mon portefeuille ( si j’en avais un ). Le récit de la mort de Donny Hathaway alors qu’il renouait avec le succès ou bien celui des dernières heures de Marvin Gaye par David Ritz, je peux les relire 10 fois, ils me collent toujours autant la chair de poule . Je ne veux pas d’une musique totalement dématérialisée. Je veux des notes auxquelles je puisse adjoindre des formes matérielles et sensibles. Des poses, du glamour ( ou pas d’ailleurs ), une attitude. Je veux des êtres qui vivent, aiment et souffrent pour leur musique, pas seulement des fichiers MP3. Car au fond, je suis resté fan.
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