Wednesday, May 21, 2008

Tati, plaît-il ?


On parle de la langue de bois des politiques mais on oublie trop souvent que les sportifs, les chanteurs et les acteurs n’ont absolument rien à leur envier. Leur dernier film est toujours leur meilleur, les techniciens étaient tous charmants et le réalisateur, un pur génie. Alors, quand le Nouvel Observateur dans son supplément télé confie à des comédiens, le soin de dégonfler quelques baudruches, c’est peu de dire qu’on est tout ouïe. Le dégommage de vaches sacrées, on kiffe plutôt ici même si malheureusement, on n’est pas soi-même irréprochable ( vous qui me lisez, vous connaissez mes intouchables).
Benoît Delépine pourfend Dancer in the dark, les frères Farrelly, Citizen Kane, Christina Ricci, A bout de souffle mais celui avec lequel je me sens le plus d’affinités, c’est Michel Galabru lorsqu’il s’en prend à Tati (je fus trois ans formateur à Collège au cinéma et je peux vous assurer que le socle de sa statue était bien vissé au sol). Voilà ce qu’en dit l’inoubliable Léon Galipeau du Viager : « j’ai honte de le dire mais Jacques Tati ne m’a jamais fait rire. Ce n’était pas un comédien. C’était un mime, très intellectuel à mon sens. A sa sortie, « Playtime », avec son coté géométrique, m’avait énervé. Les gags étaient froids, très étudiés, calculés .Rrien à voir avec le comique de Toto, Raimu, de Fernandel ou de Charles Chaplin. » Tope-là, Michel ! Comme je te comprends, moi qui fut au supplice, enfant devant les vacances de M. Hulot et qui, adulte, s’est ennuyé comme jamais au visionnement de Mon Oncle.

Et vous, les amis, quels sont les « Grands films auxquels vous mettriez une petite cote » ?

21 comments:

Jocelyn Manchec said...

Voilà qui rejoint un peu le petit sondage de la semaine sur eightdayzaweek...

Je planche, je réfléchis à mes odieux rendez-vous manqués et je m'en reviens vers vous, mon espiègle camarade !

Dr. Strangelove said...

La règle du jeu, de Renoir. Un ennui profond, c'est tout.

il Gatto said...

Galabru m'a bien fait rire aux Molières, quand il a justifié les mauvais textes qu'il a joués, les bons navets qui nourrissent une famille quand elle a faim. Tatischeff a fini ruiné, pour accomplir son oeuvre - en fait, l'Eure-et-Loir, ce n'est si pas mal quand on habite à mi-chemin entre les filles de Tati et de Vlaminck !
Bref, je hurle toujours autant de rire devant "Les Vacances de monsieur Hulot" et Galabru est un perverti amer.

Le grand film auxquel je mets une petite cote ? "Les Enfants du Paradis", parce que ça ne tient pas sur un seul DVD.

Anonymous said...

Des goûts et des couleurs... ma grand-mère disait toujours que Chaplin ne la faisait pas rire et qu'elle préférait Laurel et Hardy. Elle n'a jamais compris qu'elle avait en fait saisi la complexité de l'art chaplinesque. Moi, Tati me fait rire, sauf dans "Traffic", et je l'ai découvert enfant. L'analyse de Galabru, c'est un peu celle de ma grand mère, il touche juste sur ce qu'est Tati, autre chose qu'un acteur, un cinéaste, un mime, un artiste complet proche de Chaplin (encore), Lewis et de Keaton, bien plus que d'un "pur" acteur comique comme ceux qu'il cite (et je ne l'écris pas de façon péjorative). Qu'il ne l'apprécie pas, c'est son choix.
Sinon, les grands chef d'oeuvres que l'on trouve pénibles ne manquent pas. Je n'ai jamais, malgré mon amour de Bergman, vraiment accroché à "Persona".

Jocelyn Manchec said...

Moi j'aime aussi Tati, moins Iosselani.
Le neo-réalisme italien me barbe (Rosselini m'assomme et d'Sica m'laisse sick dirait MC Solaar).
"Andrei Roublev" m'est toujours apparu comme une punition et, nonobstant la partoche de Delerue, "Le Mépris" ne mérite pas même le mien tant je m'y ennuie toujours.
"L'Atalante" provoque ma carapate et "Sur la Route de Madison" m'a toujours semblé une impasse.
Pour ne pas dire de connerie supplémentaire, il me faudrait revoir les Fellini en N&B.

C'est bon, j'ai gagné ma lapidation (pas la vôtre cher Sonic, celle de vos commentateurs !), mon carton d'un rouge scandaleusement Drogbesque ?
J'espère.


Assez d'accord enfin (pour rattraper ma présente charge antiritale) avec le Gatto pour dire que Les Enfants du Paradis... bon ben... Bof.

Anonymous said...

D'accord sur le fond, mais je suis moins intéressé par ce qui est dégommé que par la manière.
Quand je lis "très intellectuel à mon sens", ça me gave par avance, quand bien même Playtime ou Mon Oncle sont effectivement des films froids et mécaniques.
A ce compte là, je serais curieux d'avoir l'avis de Laurent Gerra sur Garrel ("du cinéma de beatnik"), ou celui de Bigard sur Le voyage en Italie ("des cascades toutes pourries").

@dr strangelove : c'est peut-être l'ombre de Renoir qui t'impressionne, pas le film qui t'ennuie.

Quant à moi, j'ai aimé il y a longtemps Wenders et Antonioni, qui m'emmerdent aujourd'hui, comme idée de cinéma, et dont j'arrive pourtant à adorer certains films quand je tombe dessus.
C.

Eric Aussudre said...

Je pense, Christophe, qu'il ne s'agit pas d'un rejet de ce qui est intellectuel (ce qui serait stupide en effet) mais d'un rejet de ce qui peut sembler artificiel dans le cinéma de Tati (la post-synchronisation systématiqe, la hiérarchisation des sons, etc...)

Bruce said...

La Girafe adore Tati qui ne lui rend pas bien.

Anonymous said...

J'entendais bien. C'est juste que le terme "intellectuel" devient vite "intello" et finit associé à "chiant". Je sais d'avance qu'on va dériver dans le poujadisme feignasse.
Mais bon, avec Galabru, le délit de faciès est vite arrivé. Faisons-lui donc crédit.
En fait, je pensais juste que tout ça est une affaire de singularité, exactement comme pour tes obsessions successives : les idées passent bien quand elles sont formulées avec soin et dégagent un peu de passion. C'est pour ça que je me méfie des dézingages trop rapides, qui relèvent plus de l'humeur.

Soit dit en passant, on peut avec profit inverser le sens du jeu : les films mal cotés ou négligés que l'on aime. Très rigolo aussi.
C.

Jocelyn Manchec said...

Oui, cher C., le jeu à l'envers, en gant retourné, les tripes honteuses à l'air, vaut le coup itou.
J'ai l'impression que, de loin en loin, mon archivage bloguesque entreprend cet anti-halloffame...

D'emblée je donnerais alors dans "Le Grand Bazar" de Claud Zidi (décidément le vieux Galabru est archi-central dans ce débat quelque soit le bout par lequel on le prend ?!) pour n'en citer qu'un, ma cinéphilie étant faite de pépites volontiers prises pour spectaculaires crottes ailleurs...
M'en flatte of course.

il Gatto said...

Nous vous serons reconnaissants d'avoir utilisé le terme "crotte". Car j'ai tellement de sympathie pour les ruminantes de nos prés que "bouse" n'est pas forcément antipathique. Au contraire. Et de me rappeler cette blague que Mario Girotti raconte dans la fabrique de boules de billard dans "Mon nom est Personne" - à ce sujet, faut-il un P majuscule à Personne ?

Anonymous said...

Pour ma part, je rejoins assez mes petits camarades pour dire que "les enfants du paradis" sont très surfaits.
Dans le même genre, j'ai une sainte horreur du cinéma d'Autant-Lara (qui m'ennuie à mourir) et de René Clair.
"le guépard" de Visconti m'a fait beaucoup bailler mais ça n'a pas plu à certains de mes commentateurs lorsque j'ai osé l'avouer!
Par contre, je tiens "Playtime" comme l'un des plus beaux films de tous les temps et je demande l'excommunication définitive de l'ami Mariaque pour ses commentaires blasphématoires sur "le mépris" de Godard!

Dr Orlof said...

"je tiens...pour" Vous aurez rectifié!

Eric Aussudre said...

Quel dommage, mon bon docteur que nous ne nous fréquentions que virtuellement. Car si nous avions la chance de deviser l'un avec l'autre, vous m'expliqueriez sans doute pourquoi vous tenez Autant-Lara pour un mauvais (alors que je raffole de l'Auberge rouge et de La Traversée de Paris(un des seuls films véritablement céliniens)) et pourquoi vous écrivez que La Sanction est un film ignoble ( je me repasse le film dans la tête et je ne comprends pas).

Jocelyn Manchec said...

Le débat sur La Sanction est relancé ici:
http://eightdayzaweek.blogspot.com/2008/05/la-sanction.html

Celui sur Tati ouvert à jamais (le doc de July qui vient de passer ce soir sur la Cinquième m'a donné envie de tout revoir une énième fois...)

Anonymous said...

Absolument pareil que Galabru sur Tati. Et pour alimenter un peu le débat, je dirais que l'humour peut (doit ?) être intelligent mais pas intellectuel. Sinon c'est comme manger une bonne purée en se demandant dans quelle terre il faut faire pousser les pommes de terre : c'est chiant.

Bon je me relis dans 24 heures pour voir si je suis encore d'accord avec moi.

il Gatto said...

Désolé mais... pour manger une bonne purée, il faut choisir la bonne variété de pomme de terre (Bintje ou Estima).

Est-ce intellectuel une porte de salle à manger qui grince ?

Jocelyn Manchec said...

Gatto> "Grince" n'est peut-être pas le bon mot.
Je dirais quant à moi plutôt qu'elle chtonke.

Les Autres> On dit Tati ceci cela, mais Oury, Keaton ou De Funès faisaient-il autre chose que de la mécanique (de précision) à rire ? "Oscar" n'est-il pas une insensée machine, réglée à l'écrou près ? Certaines séquences du Coup du Parapluie ou de Cadet d'eau Douce ne sont-elles pas ahurissantes de virtuosité technique et chorégraphiques?
Du cinoche à se poiler mais de pas de grammaire au fond, juste des natures et des répliques qui font mouche en somme vous contenteront ?
Vous vous interdisez, se faisant, bien des délices, les aminches...

Eric Aussudre said...

Bien sûr que le dispositif d'Oscar me remplit d'allégresse mais je n'aime pas qu'on me mette les ficelles sous le nez toutes les cinq secondes et chez Tati, je ne vois que ça, que les artifices techniques.

coolbeans said...

Tati et la purée, c'est bon quand on les consomme avec des amis. Tout seul, c'est assez chiant.

Anonymous said...

Tati, Keaton, Kitano me laissent de marbre.