Saturday, July 30, 2016

Les affinités sélectives





A dire vrai, on a regardé ce film uniquement pour Zoe Kazan, si pleine de promesses dans Olive Kitteridge. Mais les premières séquences confirment les appréhensions qu'on pouvait légitimement éprouver à la lecture du synopsis : son personnage est (comme dans In Your Eyes) une caricature de hipster indé (impression renforcée par l' omniprésence de Patrick Watson dans la bande originale), recyclant lieux communs sur lieux communs sur les difficultés de l'amitié homme-femme. On a le poil hérissé de voir son immense talent gâché dans un projet aussi prévisible et aussi insignifiant, qui finalement ne tient que par la grâce d'un ou deux second rôles (ici, Adam Driver (qu'on aurait aimé quand même un peu plus trash) et Megan Park en frangine bitchy). Le plus irritant se trouve malgré tout ailleurs (même si The F... Word n'a pas l'exclusivité de cette plaie qui a contaminé une grande partie du cinéma occidental) : il s'agit de la disproportion entre les possibilités matérielles quasiment infinies dont disposent les personnages dans le film et les revenus réels dont sont censés disposer les jeunes adultes de catégorie sociale équivalente dans la vie réelle. Deux exemples pour me faire bien comprendre : comment expliquer que Wallace (Daniel Radcliffe) puisse prendre l'avion aussi facilement que le bus alors qu'il travaille en CDD dans l'élaboration de manuels pour logiciels ? De même, Chantry vit dans un appartement ultra-confortable et spacieux en plein cœur de Toronto (même si son fiancé semble disposer d'une situation enviable à l'ONU). Ce mensonge (des twenty something vivant comme des nanabs) répété à longueur de films et de séries n'a qu'un mérite : celui de faciliter le boulot des équipes de tournage. Mais il a le terrible inconvénient de nous tenir à distance et de transformer cette inoffensive bluette sentimentale en un simulacre qui laisse à croire que les contingences matérielles n'ont aucun poids dans l'établissement ou non d'une relation amoureuse adulte. Est-il possible de tromper son monde davantage ?

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